Il y a des rencontres qui surgissent dans notre vie sans prévenir, des rencontres qui ont un caractère magique par la qualité de ce qu’elles révèlent, en nous ou chez l’autre. Il est des rencontres qui nous réveillent, qui nous appellent du plus profond de notre être, du plus lointain de notre histoire. Il est des rencontres qui vont éclairer d’une lumière féconde tout un parcours de vie, pour le transformer à jamais.
Et parmi les rencontres qui furent pour moi les plus éblouissantes, les plus merveilleuses et aussi les plus interpellantes, il y a la rencontre avec la lecture.
Comment dire l’impact des découvertes multiples et étonnantes avec chacun des livres qui ont jalonné mon existence depuis l’âge de mes sept ans.
Soixante dix ans de lectures passionnées, d’émerveillements avec des pages et des pages lues et relues dans l’accueil d’un livre devenu ami.
Rencontres avec des textes si sensibles qu’ils me donnaient le sentiment d’être plus intelligent.
Et d’autres si chargés de passions qu’ils me rendaient plus vivant, plus créatifs.
Rencontres avec des idées et des images qui ont éveillé mes sens et suscité en moi le goût de voyager jusqu’aux rires des étoiles.
Rencontres encore avec des mots si humains qu’ils m’ont fait rêver durablement, aux possibles d’un monde où l’amour et la tendresse seraient accueillis sans réserve.
Lire, c’est être accordé à la musique d’une phrase et parfois aussi amplifié par la résonance d’une voix unique, celle d’un auteur qui nous rejoint, au plus proche de notre vérité intime.
Lire peut devenir ainsi, une invitation à se respecter,à aller plus loin, plus près aussi de nos possibles.
Et puis il y a les rencontres plus rares et plus précieuses aussi avec des écrivains, je veux dire des écrivants qui m’ont réconcilié avec le meilleur de moi-même, qui ont apaisé mes errances et ont suscité en moi le goût pour une autre rencontre magique, celle de l’écriture.
Ecrire, c’est accepter d’entrer à cœur ouvert dans l’inattendu d’un mot, c’est cheminer dans le labyrinthe d’un récit, c’est vibrer dans l’émotion renouvelée d’une quête, c’est plonger dans une histoire qui dépassera la nôtre. C’est être appelé, interpellé, dynamisé vers l’inouï d’un lecteur inconnu, seulement imaginé qui devient en quelques pages un interlocuteur.
Je veux aussi honorer ceux par qui la lecture est popularisée, diffusée, offerte dans chaque ville ou village, je veux parler des libraires, des bibliothèques publiques et autres, des cercles de lectures où des rencontres entre auteurs et lecteurs.
Les uns et les autres, à leur façon, ont su créer des temps et des espaces magiques pour susciter et agrandir le goût de lire. Des lieux qui savent nous rappeler, qu’un livre a toujours deux auteurs : celui qui l’écrit et celui qui le lit.
Jacques Salomé est l’auteur de La ferveur de vivre – Albin Michel 2012
Source : www.cle.com